“Ma vie et mon oeuvre sont identiques, l’une est l’autre.
Ma vie est en quelque sorte la quintessence de ce que j’ai écrit et non l’inverse.”

— C. G. Jung

Vous est-il déjà venu à l’esprit que chaque émotion remplit une fonction bien précise ? Chaque émotion a un message à vous délivrer et trouve son écho dans un besoin à satisfaire. En toute honnêteté, je ne m’étais jamais posé la question avant de me former au coaching et de lire l’ouvrage de Christel Petitcollin.

« L’émotion est ce moment où l’acier rencontre une pierre et en fait jaillir une étincelle car l’émotion est la source principale de toute prise de conscience ».

– Carl Gustav Jung

« Je n’aime pas les enfants qui pleurent ».  « Si tu te mets en colère, on t’enferme dans ta chambre ». « Tu ris trop fort ».  « Un garçon n’a pas peur ».  « Calme-toi ».  « Tu es trop sensible ».  « Une fille ne se met pas en colère ». « Il n’y a que les mauviettes qui pleurent ».  « Cesse de faire un caprice ».  « Il ne faut pas pleurer pour ça »….

Phrases anodines prononcées aux quatre saisons de l’enfance, ces injonctions forgent l’identité de l’adulte en devenir.  L’intensité des émotions dérange. Depuis notre plus jeune âge, nous  intégrons le tabou social lié à leur expression.  Nous apprenons à les contenir et à les refouler.  La méfiance finit par s’installer:  qui sont-elles ces émotions qui conduisent à être puni, jugé, humilié, qui nous font sentir petit, honteux et minable ? Hôtes encombrants, nous cherchons à nous en débarrasser.

Arrivés à l’âge adulte, il se peut que nous ayons construit une forteresse, coupés de nos émotions, ou que nous en soyons devenus l’esclave.  Cherchant vainement à les contenir, nous sommes débordés par les cris, larmes, crises d’angoisse ou bouffées d’agressivité.

Sans aller dans ces deux extrêmes, il est plus courant d’être simplement étranger à ses émotions.  N’ayant jamais appris ni à les écouter ni à les décoder, nous sommes incapables d’identifier leur fonction, voire même de les repérer.  Pourtant, chaque émotion a une information à nous délivrer.  C’est ce que Christel Petitcollin, psychothérapeute, nous explique dans son livre « Emotions, mode d’emploi ».

Il existe quatre émotions de base: la joie, la colère, la tristesse et la peur.  

  • La joie est le moteur de la vie. Identifier ce qui rend joyeux nous indique nos sources de motivation.  Autant d’indices pour nous aiguiller dans nos choix de vie et nous faire avancer.  C’est la seule émotion que le cerveau tente de reproduire constamment.
  • La colère s’éveille quand nos limites ne sont pas respectées.  Etre attentif aux premiers signes d’agacement nous éclaire sur nos besoins et valeurs.  Sa fonction est de nous encourager à les exprimer pour nous faire respecter.  
  • La tristesse permet de clore une période de vie pour nous rendre disponible à un renouveau.  Elle nous invite à prendre soin de nous.
  • La peur nous prépare à faire face à un danger.  Si celui-ci peut être réel, le plus souvent il est cognitif.  Ce sont les pensées qui provoquent les peurs.

C’est à travers ces émotions que le cerveau s’adresse à nous. Pour qui sait les écouter, celles-ci sont de précieux repères dans la vie. Malheureusement, souvent, la boussole détraquée nous laisse perdus face à la direction à emprunter.

Dans la première partie de son ouvrage, Petitcollin offre un aperçu concis et complet de la fonction de chaque émotion, des causes de notre perte de repères émotionnels et des dysfonctionnements qui en découlent.  A côté des émotions innées, telles que la joie, la colère, la tristesse et la peur, Petitcollin détaille toute une palette de variantes émotionnelles.  

Dans la seconde partie, elle s’attèle à transmettre une juste compréhension et expression des émotions, qui peut se résumer de la manière suivante:

  • accepter les émotions lorsqu’elles se présentent,
  • en détecter les ressentis corporels,
  • apprendre à les reconnaître et à les distinguer,
  • comprendre leurs fonctionnements,
  • écouter ce qu’elles ont à nous dire,
  • les exprimer en adéquation avec la situation et le moment, avec une intensité et une durée adaptées à l’événement,
  • et passer à l’action.

Plutôt qu’essayer de dompter vos émotions, en les gérant, ce qui revient bien souvent à vouloir les refouler, ouvrez-leur la porte, même timidement.  C’est en les accueillant que leur expression deviendra adéquate.  Vous gagnerez en authenticité. La première fois risque d’être inconfortable, la seconde et les suivantes aussi. Changer un comportement est laborieux. Plus vous persévérerez, plus vous gagnerez en fluidité. C’est un peu comme un nouveau chemin à tracer. Il faut du temps avant que cela devienne une autoroute. Et cette autoroute, il s’agit en réalité d’une nouvelle connexion neuronale. C’est à force de l’emprunter que le chemin se trace.    

Et vous, où en êtes-vous face à vos émotions ?

  • lesquelles vous ont été interdites ?
  • lesquelles autorisées ?
  • qu’est-ce que votre colère/tristesse/peur/joie a à vous dire ?
    • identifiez une situation qui vous procure de la joie, quelle est la source de cette motivation ?
    • identifiez une situation qui vous rend triste, comment pouvez-vous prendre soin de vous ?
    • identifiez une situation qui vous met en colère, comment pouvez-vous exprimer vos limites et valeurs ?
    • identifiez une situation qui engendre de la peur, le danger est-il réel ou est-il provoqué par vos pensées ?
  • quelle est l’intention positive de l’émotion qui vous traverse ?
  • à quel besoin est-elle reliée ?
  • avez-vous appris à pleurer (tristesse) parce que la colère vous était interdite (émotion parasite) ? ou, inversément, vous mettez-vous en colère lorsqu’en réalité vous êtes triste ?
  • exagérez-vous certaines émotions pour garder une emprise sur votre entourage, même sans en être conscient (racket émotionnel)? Tel est le cas de l’homme coléreux auquel l’entourage obéit instantanément dés les premiers signes d’irritation ou de la femme dépressive ayant recours aux larmes (ou menaçant de se suicider) pour éviter de se confronter à sa vie, son passé, une discussion dérangeante.
  • avez-vous déjà été surpris par l’expression d’une émotion sans commune mesure avec l’incident l’ayant provoqué ? Il peut s’agir d’une émotion élastique prenant source dans une situation passée.  Tel peut être le cas du parent se fâchant sur son enfant alors qu’il a des soucis avec un collègue.  Il serait plus juste qu’il exprime son mécontentement à son collègue qu’à son enfant.  
  • contenez-vous certaines émotions au point qu’elles explosent de manière imprévue et disproportionnée ?  C’est le principe de la carte de fidélité où vous collectionnez des « timbres psychologiques » à chaque fois que vous refoulez l’expression d’une émotion jusqu’à un certain seuil.  Une fois atteint, ce seuil déclenche l’émotion, souvent de manière imprévue, brutale et disproportionnée par rapport à l’incident.  Malgré vous, vous voilà esclave de cette émotion dont vous n’avez choisi ni le moment ni la manière d’expression.
  • saviez-vous que l’angoisse est le résultat d’un refoulement émotionnel trop important ? A force d’avoir comprimé ses colères, nié ses peurs, s’être interdit de pleurer, nous avons entretenu un réservoir d’émotions réprimées qui, ne sachant plus s’exprimer adéquatement, laisse libre cours à l’angoisse.

Pour aller plus loin:

Il existe un petit jeu de cartes sur le langage des émotions et des besoins (http://www.fcppf.be/portfolio/items/le-langage-des-emotions/). C’est facile à utiliser avec des enfants et tout aussi pertinent pour les adultes.

De temps à autre, il arrive à mes enfants d’aller chercher eux-mêmes ces cartes. On cherche alors ensemble à identifier les émotions qui les traversent et les besoins sous-jacents. Souvent très efficace pour rétablir l’harmonie…